Adrià Budry Carbó
Adrià Budry Carbó, 30, is a journalist at the Swiss newspaper Le Temps.
He works for the Economy & Finance section and also does international features. Born in Geneva, the grand-son of a Spanish civil war veteran, he holds an e-Estonian digital residency. He previously worked in Central America where he wrote on the decline of Sandinism, the criminalisation of abortion and «maras» endemic violence in El Salvador. He holds a Masters of research in International Relations from the London School of Economics and a Bachelor Degree from the University of Geneva, where he Spanish democratic transition and the History of nationalisms. He is the co-author of Fragments de vie (Ed Labor et Fides, 2015) in which he tells the story of two South American political refugees. |
Adrià Budry Carbó, 30 ans, est journaliste au quotidien suisse Le Temps.
Il est rattaché à la rubrique Economie & Finance et réalise de grands reportages. Né à Genève, petit-fils d’un vétéran de la guerre civile espagnole et résident numérique e-Estonien, il a précédemment travaillé en Amérique centrale. Il a notamment écrit sur le déclin du sandinisme, la pénalisation de l’avortement et la violence endémique des «maras» au Salvador. Il est titulaire d'une maîtrise de recherche de la London School of Economics (LSE) et d’un bachelor en Relations Internationales de l’Université de Genève. Ses sujets de recherche ont principalement porté sur la transition démocratique espagnole et l’histoire des nationalismes. Il est coauteur de l’ouvrage Fragments de vie (Ed. Labor et Fides, 2015) où il a narré le parcours de deux réfugiés politiques sud-américains. |
A bord de l'Aquarius, j'ai beaucoup pensé à mon grand père. Je ne sais pas pourquoi. Mon grand-père, c'est celui qui n'a jamais émigré. Il n'a jamais eu besoin de monter sur un bateau pour traverser une quelconque frontière maritime.
Moi j'ai toujours été très fier de mon grand-père. Quand il avait 16 ans, le gouvernement espagnol lui a demandé d'aller combattre le fascisme. Avec lui, ils étaient 30'000 adolescents à faire partie de ce que l'on a appelé le Bataillon du Biberon... Et moi j'étais tellement fier de mon grand-père républicain.
Lui, il n'aimait pourtant pas trop parler de la guerre. C'était un homme qui économisait jusqu'à ses propres mots. Mais, en 2004, trois ans avant sa mort, il a fini par accepter de rouvrir les anciennes blessures. Parce que son petit-fils avait 16 ans, et qu'il avait décidé de faire son son travail de maturité sur la guerre civile espagnole.
On a mangé ensemble au restaurant tous les midis pendant deux semaines. Je prenais des notes pendant qu'il racontait. Ca été le meilleur été que j'ai passé avec lui.
Mais j'ai aussi compris que mon grand-père n'était pas Républicain. C'était juste un gamin de la campagne qui est né dans un pays en guerre, en Europe occidentale. Il n'y a pas si longtemps.
Mon grand-père a survécu à la bataille de l'Ebre, parce qu'il n'a jamais traversé le fleuve. La faute à un commandant qui a décidé de ne pas respecter l'ordre de l'Etat major républicain.
Si je vous raconte tout ça ce soir, c'est parce que l'histoire a une affreuse tendance à se répéter. Et l'aventure humaine consiste trop souvent à traverser des fleuves, des mers ou des frontières au péril de sa vie.
Alors, ce soir j'aimerais avoir une pensée pour lui et pour ma mère qui ne sont plus là pour m'accompagner. Mais, surtout, pour tous ceux qui sont nés du mauvais côté de la vie.
Adrià Budry Carbó
Moi j'ai toujours été très fier de mon grand-père. Quand il avait 16 ans, le gouvernement espagnol lui a demandé d'aller combattre le fascisme. Avec lui, ils étaient 30'000 adolescents à faire partie de ce que l'on a appelé le Bataillon du Biberon... Et moi j'étais tellement fier de mon grand-père républicain.
Lui, il n'aimait pourtant pas trop parler de la guerre. C'était un homme qui économisait jusqu'à ses propres mots. Mais, en 2004, trois ans avant sa mort, il a fini par accepter de rouvrir les anciennes blessures. Parce que son petit-fils avait 16 ans, et qu'il avait décidé de faire son son travail de maturité sur la guerre civile espagnole.
On a mangé ensemble au restaurant tous les midis pendant deux semaines. Je prenais des notes pendant qu'il racontait. Ca été le meilleur été que j'ai passé avec lui.
Mais j'ai aussi compris que mon grand-père n'était pas Républicain. C'était juste un gamin de la campagne qui est né dans un pays en guerre, en Europe occidentale. Il n'y a pas si longtemps.
Mon grand-père a survécu à la bataille de l'Ebre, parce qu'il n'a jamais traversé le fleuve. La faute à un commandant qui a décidé de ne pas respecter l'ordre de l'Etat major républicain.
Si je vous raconte tout ça ce soir, c'est parce que l'histoire a une affreuse tendance à se répéter. Et l'aventure humaine consiste trop souvent à traverser des fleuves, des mers ou des frontières au péril de sa vie.
Alors, ce soir j'aimerais avoir une pensée pour lui et pour ma mère qui ne sont plus là pour m'accompagner. Mais, surtout, pour tous ceux qui sont nés du mauvais côté de la vie.
Adrià Budry Carbó